Loi PACTE et entreprises en difficulté : ce qui change
Dans cet article, nous décodons l’impact concret de la loi PACTE sur le droit des entreprises en difficulté. La réforme rebat des cartes sensibles : délais et créances publiques, rôle du dirigeant, cadence des liquidations, transmissions sous plan de cession, et relance par rétablissement professionnel. Nous passons en revue les nouveautés, leurs effets au quotidien et une méthode simple pour agir sans perdre de temps. L’objectif reste clair : préserver l’activité viable, protéger l’emploi quand c’est possible, et fermer proprement quand il le faut.
Pourquoi la PACTE change la donne
La PACTE cherche l’efficacité. Elle encadre des délais qui dérivaient. Elle sécurise des transmissions fragiles. Elle accélère l’issue des procédures. Elle responsabilise aussi les acteurs publics et privés. En pratique, cela signifie moins d’aléas, plus de visibilité et des trajectoires lisibles pour les TPE/PME comme pour les exploitations agricoles.
Le message est simple : décider plus tôt, documenter mieux, et sortir plus vite. Les entreprises gagnent en respiration. Les partenaires savent à quoi s’en tenir. Les tribunaux arbitrent avec des repères plus nets.
Les nouveautés majeures, expliquées simplement
Créances du Trésor : un calendrier verrouillé
Pour les procédures ouvertes après le 1er janvier 2020, le Trésor doit établir définitivement ses créances admises à titre provisionnel dans un délai de douze mois (hors contrôles/rectifications). Fini les titres qui tombent longtemps après l’adoption d’un plan et qui le torpillent. Ce bornage apporte de la stabilité budgétaire et renforce la crédibilité des projections de trésorerie.
Conseil terrain. Dès l’ouverture, centralisez tous les échanges avec l’administration fiscale. Tenez un tableau de suivi des montants, des déductions et des échéanciers proposés. Au douzième mois, vérifiez le « gel » effectif des créances.
Exploitations agricoles : plans sur quinze ans
Les entreprises exerçant une activité agricole peuvent désormais bénéficier d’un plan de redressement sur 15 ans. Ce privilège, réservé auparavant aux agriculteurs personnes physiques, devient accessible aux sociétés. La réforme colle aux cycles longs : investissements lourds, aléas météo, maturité des cultures ou des élevages.
Ce que cela change. Les annuités baissent. La trésorerie respire. Le plan se soutient mieux face à un millésime raté ou une hausse soudaine des intrants.
Redressement judiciaire : un dirigeant plus acteur
Le débiteur peut proposer le nom d’un ou plusieurs administrateurs judiciaires. Sa rémunération est, en principe, maintenue pendant la procédure, sauf décision contraire du juge-commissaire. L’entreprise garde son pilote. La communication interne reste claire. On évite l’effet « vide de gouvernance » au pire moment.
Bon réflexe. Préparez en amont une courte liste d’administrateurs connaissant votre secteur. Justifiez votre choix par des éléments factuels : taille, réseau fournisseurs, enjeux sociaux, calendrier commercial.
Liquidation judiciaire simplifiée : plus fréquente, plus rapide
La liquidation judiciaire simplifiée devient obligatoire pour certaines petites structures (seuils fixés par décret). La clôture doit intervenir sous six mois, ou un an si l’entreprise dépasse certains seuils de chiffre d’affaires et d’effectifs. L’idée : réduire les coûts, l’incertitude et l’empreinte psychologique d’une procédure interminable.
Checklist express. Inventaire des actifs, liste des créanciers, contrats en cours, situation des baux, état des stocks, et pièces sociales : rassemblez tout dès l’ouverture pour viser la clôture courte.
Plan de cession : sécurité renforcée côté bail
Dans un plan de cession, les clauses de solidarité qui faisaient peser sur le cessionnaire des dettes passées sont neutralisées. Le bail commercial cesse d’être un caillou dans la chaussure du repreneur. La reprise s’évalue sur l’avenir, pas sur les arriérés inconnus d’hier.
Effet immédiat. Les sites deviennent plus attractifs. Les repreneurs engagent des capitaux sur l’outil de production, pas sur des passifs cachés.
Rétablissement professionnel : la voie rapide proposée d’office
Le tribunal peut proposer d’office le rétablissement professionnel aux débiteurs éligibles, notamment à l’occasion d’une demande de liquidation ou après l’échec d’un plan. Cette procédure sans liquidation judiciaire, ciblée et allégée, permet une remise à zéro rapide quand l’actif est faible et le passif limité.
Pour qui ? Micro-structures sans salarié, actifs réalisables faibles, passif plafonné. L’outil évite de « casser » plus que nécessaire et permet au dirigeant de rebondir.
Privilège du Trésor : un seuil de publicité relevé
Le seuil de publicité obligatoire pour certaines créances fiscales peut être relevé de 15 000 € à 200 000 € (selon décret). L’objectif est de limiter la stigmatisation d’entreprises pour des montants intermédiaires et de préserver leur réputation auprès des banques et fournisseurs.
Lecture pragmatique. Une mention publique évitée, c’est une relation bancaire moins crispée et des conditions d’achat plus stables.
Avant/Après : ce que vous allez vraiment voir
- Trésor public : le couperet des douze mois fixe la photo des dettes. Les plans deviennent crédibles aux yeux des partenaires.
- Gouvernance : le dirigeant propose son administrateur, reste en poste et garde le cap opérationnel.
- Liquidation : quand la relance est impossible, on ferme vite et proprement. Les personnes passent à autre chose.
- Reprise d’actifs : les baux ne dissuadent plus les investisseurs à cause d’anciennes solidarités.
- Micro-défaillances : le rétablissement professionnel offre une sortie courte et sans fracas.
La méthode qui évite 80 % des erreurs
- Photographier la situation : trésorerie 13 semaines, dettes publiques/privées, baux, litiges, carnet de commandes.
- Choisir l’outil : conciliation, sauvegarde, redressement, cession, ou rétablissement professionnel. Pas d’hésitations longues.
- Parler tôt aux créanciers clés : Trésor, URSSAF, banques, bailleur. Le silence coûte plus cher que la transparence.
- Documenter des hypothèses sobres : marges par ligne, délais de paiement réalistes, plan social si nécessaire.
- Tenir le tempo procédural : productions, convocations, échanges écrits. Chaque date respecte un ordre de bataille clair.
- Exécuter et piloter : reporting mensuel aux organes, correctifs rapides, arbitrages écrits.
Trois cas concrets
Commerçant de centre-ville : « on s’en sort ou on ferme vite »
Chiffre d’affaires en baisse, lourds arriérés de loyers. Conciliation, discussion loyale avec le Trésor qui fige ses créances dans le délai d’un an, puis pivot : faute de traction suffisante, liquidation judiciaire simplifiée, clôture en six mois. Le repreneur s’intéresse au bail, rassuré par l’absence de solidarité rétroactive. Tout le monde gagne du temps.
Domaine agricole : « plan 15 ans ou rien »
Investissements récents, aléas climatiques sur deux récoltes. Plan sur quinze ans, annuités adaptées aux cycles, cessions d’actifs non stratégiques. La structure passe le creux. Les banques suivent car le calendrier épouse la réalité de l’exploitation.
Atelier repris en plan de cession : « repartir net »
Atout principal : un site bien placé et une équipe fidèle. Le bail suit la cession sans clause de solidarité héritée. Le cessionnaire investit dans des machines, pas dans des arriérés. Le plan tient. Les emplois clés sont préservés.
Pièges à éviter absolument
- Attendre la dernière minute. Plus vous tardez, moins le tribunal dispose d’options.
- Découper la négociation. Il faut coordonner banques, Trésor, bailleurs et fournisseurs stratégiques.
- Survendre vos hypothèses. Les chiffres doivent rester modestes et prouvables.
- Oublier les baux. Un bail mal géré ruine une cession viable.
- Négliger la dimension sociale. Informez vite, accompagnez, anticipez le calendrier CSE.
Tableau de bord minimal
- Cash 13 semaines : encaissements, décaissements, tensions prévues.
- Échéancier unique : dettes publiques/privées, intérêts, garanties, covenants.
- Marge par ligne : produits gagnants/perdants, décisions rapides à l’appui.
- Baux : loyers, indexation, renouvellement, état des lieux, sous-locations.
- Indicateurs RH : absentéisme, postes critiques, coûts de restructuration.
Vos questions, nos réponses
Ma rémunération est-elle protégée pendant le redressement ?
Oui, en principe. Le juge-commissaire peut l’aménager au vu de la situation. Présentez un budget réaliste, étayé et cohérent avec votre plan.
Puis-je choisir mon administrateur ?
Vous pouvez proposer des noms. Préparez des profils adaptés à votre secteur et motivés par des éléments objectifs. Cette proposition facilite une mise en place rapide.
La liquidation simplifiée s’applique-t-elle à mon cas ?
Elle vise les petites structures sous seuils. Si vous êtes éligible, anticipez les documents pour viser la clôture en six mois.
Le rétablissement professionnel efface-t-il toutes mes dettes ?
Il efface des dettes sous conditions. Il ne s’applique pas à tous. Un diagnostic rapide s’impose pour valider l’éligibilité.
Que devient le bail en cas de plan de cession ?
Le bail suit la cession. Les clauses de solidarité du cessionnaire pour des dettes anciennes sont neutralisées. Le repreneur repart sur une base assainie.
Conseils pratiques pour dirigeants pressés
- Parlez tôt avec le Trésor et l’URSSAF. Le délai de douze mois s’anticipe, il ne se subit pas.
- Arbitrez vos contrats. Conservez ce qui protège la marge, renégociez le reste.
- Cartographiez vos actifs cessibles. Préparez un dossier clair pour les repreneurs.
- Préservez les fonctions clés. Sans ventes, sans achat, sans maintenance, pas de redressement.
- Documentez tout. Un écrit vaut dix paroles en audience.
Le rôle des autres acteurs, en bref
- Banques : elles regardent la visibilité sur les créances publiques, la marge par ligne, et la discipline de reporting.
- Fournisseurs : ils suivent les délais et la qualité d’information. Un plan clair obtient un allongement prudent des conditions.
- Bailleurs : ils arbitrent entre acompte, échéancier et garanties. Le sort du bail sous plan de cession redevient attractif.
- Salariés : le temps de l’information compte. Une parole claire évite des départs en chaîne et protège les postes clés.
Protocole express pour un mois décisif
- Semaine 1 : audit flash, cash 13 semaines, cartographie dettes/actifs, contact Trésor-URSSAF-banques.
- Semaine 2 : choix de la procédure, dossier prêt, proposition d’administrateur, pré-négociation bailleur.
- Semaine 3 : audience, premiers arbitrages, communication interne cadrée.
- Semaine 4 : lancement du plan, reporting simple, quick wins sur marges et frais fixes.
Et si la relance n’est pas réaliste ?
Il faut savoir fermer proprement. La liquidation judiciaire simplifiée va à l’essentiel : inventaire, vérifications, réalisations, puis clôture. Cette clarté protège le dirigeant, rassure les partenaires et permet un rebond rapide. Un dossier net vaut mieux qu’une survie artificielle qui détruit du capital et décourage les équipes.
L’accompagnement de votre cabinet d’avocat LEFEBVRE AVOCAT
Nous savons que décider dans l’urgence n’est jamais confortable. Chez LEFEBVRE AVOCAT, nous commençons par vous écouter. Nous posons des faits, un calendrier et des priorités. Nous parlons simple. Nous agissons vite.
Concrètement, nous :
- réalisons un diagnostic express (cash, dettes, baux, social, contrats),
- choisissons avec vous la procédure adaptée et préparons le dossier,
- organisons les échanges avec Trésor, URSSAF, banques et bailleurs,
- sécurisons les contrats clés et les projets de cession si nécessaire,
- tenons le tempo procédural et le reporting, audience après audience,
- favorisons l’accord quand il est possible et plaidons fermement quand il le faut.
Notre ligne reste constante : clarté, réactivité et mesure. Nous ne promettons pas l’impossible. Nous construisons des solutions tenables. Et nous vous laissons toujours la main sur les choix déterminants.
Vous souhaitez obtenir plus d’informations ou faire appel à nos services ? N’hésitez pas à nous contacter dès aujourd’hui.