LA GARANTIE D’ACTIF ET DE PASSIF

 

Rappels basiques sur la garantie de passif (GAP)

Une évolution jurisprudentielle et liée à la réforme du droit des contrats, en tout cas pour les garanties conclues après 2016. On parle de garantie de passif et d’actif lorsque :

  • Passif: garantie de passif occulte au moment où il n’était pas inscrit ou insuffisamment inscrit au bilan et qui s’est révélé postérieurement à l’acte de cession. Souvent, on fait courir cette garantie à compter de l’arrêt d’un bilan de référence. Le temps que l’on signe le deal et l’acte il se passe souvent des choses, il est donc important de sécuriser cette période.

 

  • Actif: c’est la valeur de la société, càd les actifs qui subissent une dépréciation : la cause est antérieure à l’acte de cession. Une jurisprudence récente mentionne que quand bien même la valeur des actions ne diminue pas, la garantie d’actifs peut jouer lorsqu’un bien au bilan est dévalorisée.

Il n’y a pas de modèle type de garantie d’actif ou de passif. Ce qui est important c’est l’audit comptable, social et financier qui est fait préalablement par les acteurs compétents. Cela va permettre aux professionnels d’analyser et de ne pas se bloquer sur des durées longues alors qu’en définitive on peut être assuré par un audit important.

 

 

Conditions de GAP

Il faut que le litige concerne un montant un peu important pour ne pas polluer les relations.

Seuils de déclenchement : le dommage qui est évalué doit atteindre un certain seuil avec des plafonds de garanties. Il est préférable de mentionner la garantie car ce peut aussi être la société cible, par exemple si nous sommes face à une cession entière d’une société.

Sur les précautions à prendre : la réalisation d’un audit préalable et les déclarations du cessionnaire sont nécessaires (intérêt du volet déclaratif) ; bien lire les audits, les déclarations du cédant car cela peut rassurer et figer les choses. Il faut se mettre d’accord sur le bilan de référence.

Sur le plafond de garantie il faut fixer un plafond par rapport au montant de la cession. Ce sera d’autant plus facile à évaluer que l’on aura notre audit comptable.

 

Modalités relatives à la durée de la GAP 

Les durées ont été allongées en ce qui concerne les garanties de passif. Elles sont calquées sur la prescription fiscale ou bien des délais en matière sociale, notamment depuis la crise sanitaire. On peut tout à fait innover et créer des durées différentes en fonction des contentieux révélés, ce qui permet de diminuer petit à petit les seuils de garanties. Les délais de mise en œuvre de garanties : il faut être attentif sur l’activité (JP de 2020 délai de 45 jours pour faire jouer une sûreté bancaire : c’est la volonté commune des parties qui joue). Fréquemment les délais sont stipulés, en général on est sur 3-4 ans mais cela a été augmenté de 24 mois récemment en raison de la crise.

Revirement de la JP de la chambre criminelle sur la responsabilité pénale du cessionnaire : elle a suivi une vieille directive européenne sur le fait que céder intégralement sa société était un moyen d’échapper à sa responsabilité pénale. Les tribunaux ont rattrapé cette erreur et ont dernièrement sanctionné une société cessionnaire, mais c’était limité car on était sur une règlementation douanière qui n’avait pas été respectée.

 

Ecueils dans lesquels il ne faut pas tomber

Au niveau de la rédaction et de la négociation

On est dans un processus contractuel, et donc de volonté des parties. Le problème n’est pas tellement de rédaction mais surtout de négociation. Il y a des enjeux puisque la cession d’action voire de fonds de commerce représente de forts enjeux financiers, on peut passer des journées à négocier. Certaines clauses pauvres en droit peuvent donner pleinement satisfaction. La rédaction pèse lourd sur la qualité des négociations.

La jurisprudence dit que quand bien même l’acquéreur avait eu connaissance d’un évènement qui n’était pas suffisamment écrit au bilan alors la garantie joue.

 

Influence de la crise sanitaire sur les garanties de passif

Le précontentieux actuel est d’abord sur le prix avant d’être sur la GAP. Cela signifie que si le prix n’a pas été complètement payé avant la crise alors on ira sur la GAP que si l’on ne peut pas le remettre en cause.

 

  1. Les GAP signées avant le début de la crise

A partir de quand peut-on considérer qu’il y a une crise ? Déclaration de LEMAIRE du 28 février 2000 = cas de force majeure. Ce n’est pas la date à retenir juridiquement mais le 11 mars 2020 l’OMS déclare la pandémie mondiale. On peut retenir cette date mais en droit français on prend la date du 12 mars 2020 (cf ordonnance du 25 mars 2020).

 

  1. Eléments de forme

 

  1. Les délais

Que se passe-t-il si je n’ai pas pu faire jouer ce délai avant ? Réponse ordonnance mars 2020 : les clauses prévoyant une déchéance sont réputées n’avoir pas pris cours si elles ont expiré avant le 23 juin 2020.

Hypothèse où le délai est un délai sanction. Quand on a un délai sanction alors on pourra utiliser cette ordonnance du 25 mars 2020.

  1. La prescription

La garantie d’actif et de passif joue pour la durée de prescription applicable au sinistre. Est-ce qu’on peut augmenter les délais de prescription de la GAP ? Dans les rédactions on peut créer conventionnellement un délai de prescription qui n’est pas reporté sur le fondement de l’ordonnance du 25 mars 2020.

Pour autant le bénéficiaire de la garantie qui n’aurait pas pu la faire jouer dans le délai a quand même un outil juridique pour la mettre en œuvre : la force majeure. La jurisprudence retient que la crise du Covid est un cas de force majeure (CA Colmar, 12 mars 2020 ; Cass. crim, 6 octobre 2020 n°20.8374). Cette affirmation a été énoncée en procédure pénale mais est transposable en toute matière.

Une autre décision Cass.crim, 21 octobre 2020 a été rendue dans laquelle la chambre criminelle considère que les délais n’ont pas à être respectés. Le bénéficiaire de la garantie pourrait quand même la mettre en œuvre.

 

  1. Eléments de fond

On constate une augmentation des cas de déclenchement liés à la crise sanitaire.

  1. La dépréciation

On voit qu’il y a beaucoup de dépréciation des fonds de commerce par les commissaires aux comptes ainsi que les mandataires. Si l’on a garanti l’actif alors cela peut entraîner l’obligation de garantir l’acheteur. La dépréciation du fonds de commerce recommandée par le commissaire aux comptes pourrait mettre en jeu la garantie d’actif.

  1. Les créances impayées

Les créances impayées constituent un second élément déclencher. Quand on a vendu notre boite alors avec la crise les délais de paiement sont de plus en plus longs. Que peut dire le garant pour ne pas avoir à payer ses créances dans les délais contractuels ? On peut ici aussi utiliser l’argument de la force majeure (PGE qui tarde à arriver…) qui permet au garant de ne pas respecter son obligation de garantie.

 

  1. Les GAP signées après le début de la crise

Est-ce que la situation a eu un impact ? Oui, évolution dans 3 directions

 

  1. Mieux protéger sa due diligence

Comment sont rédigées les clauses ? On voit parfois dans les contrats la rédaction suivante : sont considérés comme des cas de force majeure épidémie, guerre… Mais la rédaction actuelle de l’article 1218 n’est pas du tout un cas de force majeure. Or si dans le contrat on avait prévu qu’il y aurait le coronavirus c’est plus du cas de la clause d’exonération de responsabilité. Il faut donc faire attention à la rédaction.

Attention à prendre compte les autres audits :

  • Business (répartition géographique des fournisseurs, des clients, des partenaires…)
  • Social (chômage partiel et règles sur le télétravail)

 

  1. Mieux rédiger ses garanties

De nouveaux cas de contentieux vont naître (licenciements pour motif économique). Il faut négocier des délais supplémentaires.

 

  1. Mieux protéger les acquéreurs

 

  1. La garantie de la garantie

Il faut souvent prévoir la garantie de la garantie. On prévoit généralement que l’acheteur doit avoir une garantie pour le sistre, il faut s’attacher à l’obtenir. Cela peut être une garantie de garantie de la société mère, un décalage du prix. Si le garant ne peut pas lui-même se faire garantir alors il faut faire une garantie de la garantie.

  1. Les compensations

Quand on est le garant il peut y avoir de l’argent qui rentre en plus : finalement, le client paye. C’est de l’argent qui rentre en plus ou encore une indemnité d’assurance. Si ce n’est pas prévu dans le contrat c’est avantageux pour l’acheteur. Ces plus vont venir se compenser avec les moins, et on ne paiera que la différence. Surtout, il faut faire attention à bien les rédiger : qu’est-ce que je peux compenser et pendant combien d’années ? Ne peuvent se compenser que les sommes sur une année N. Mais aujourd’hui avec l’augmentation des délais il faut aller plus loin et faire que les plus et les moins se compensent pendant toute la durée de la garantie.