Dans un avis contentieux, le Conseil d’État décrit les vérifications puis l’appréciation que doit porter une cour administrative d’appel saisie d’un recours contre un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale (AEC), procédure unique instituée par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014.
La cour administrative d’appel de Bordeaux avait saisi le Conseil d’État de questions relatives à son office concernant des projets, simultanément soumis à AEC et à permis de construire, qui ont bénéficié d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial compétente. La recevabilité du recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire en tant qu’il vaut AEC est notamment soumise à la double condition, d’une part, que le requérant soit au nombre des personnes, mentionnées au I de l’article L. 752-17 du code de commerce, qui ont qualité pour contester le permis et, d’autre part, que le requérant ait préalablement exercé, si le projet a fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial, un recours contre cet avis, régulièrement déposé devant la Commission nationale d’aménagement commerciale (CNAC).
Ainsi, selon le Conseil d’État, la cour administrative d’appel doit s’assurer que « le requérant est au nombre de ceux qui ont intérêt pour agir devant le juge administratif et notamment, s’il s’agit d’un concurrent, que son activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise du projet, est susceptible d’être affectée par celui-ci ». Le Conseil d’État rappelle ici que tout professionnel dont l’activité est susceptible d’être affectée par un projet situé dans les limites de la zone de chalandise d’un projet a un intérêt à agir (CE 26 sept. 2018, n° 402275, Distribution Casino France [Sté], Dalloz actualité, 4 oct. 2018, obs. J.-M. Pastor ; Lebon ; AJDA 2018. 1870 ; RDI 2018. 622, obs. M. Revert ). Puis la cour doit vérifier, « si le projet a fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial, que le requérant a, préalablement à l’introduction de sa requête, déposé contre cet avis un recours devant la Commission nationale qui respecte les conditions de recevabilité [fixées aux articles L. 752-17 et R. 752-30 à R. 752-32 du code de commerce] ».
Danthonysation à la suite d’un RAPO rejeté à tort
Si la CNAC a rejeté à tort pour irrecevabilité le recours administratif préalable obligatoire, « alors que la cour administrative d’appel juge recevable la requête, le rejet pour irrecevabilité prononcée par la CNAC doit être regardé comme une irrégularité entachant la procédure de délivrance du permis de construire », précise le Conseil d’État.
Dans ces conditions, il est possible pour le juge de neutraliser le vice de la procédure en faisant application de la jurisprudence Danthony (CE 23 déc. 2011, n° 335033, Dalloz actualité, 5 janv. 2012, obs. M.-C. de Montecler ; Lebon p. 649 ; AJDA 2012. 7 ; ibid. 195 , chron. X. Domino et A. Bretonneau ; ibid. 1484, étude C. Mialot ; ibid. 1609, tribune B. Seiller ; D. 2013. 324, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot ; AJDI 2014. 16, étude S. Gilbert ; ibid. 2015. 25, chron. S. Gilbert ; ibid. 2016. 27, étude S. Gilbert ; ibid. 2017. 26, étude S. Gilbert ; AJCT 2015. 388, étude R. Bonnefont ; RFDA 2012. 284, concl. G. Dumortier ; ibid. 296, note P. Cassia ; ibid. 423, étude R. Hostiou ). Le Conseil d’État précise en effet qu’il appartient à la cour administrative d’appel, « saisie d’un moyen en ce sens, d’apprécier, au vu de l’ensemble des circonstances de l’espèce et, notamment, de la teneur des autres recours le cas échéant examinés sur le fond par la CNAC, si cette irrégularité est susceptible d’avoir eu une incidence sur le sens de la décision attaquée, l’obligation de saisir préalablement la CNAC avant toute introduction d’un recours contentieux ne constituant pas, en tout état de cause, une garantie pour les personnes intéressées ».
Par Jean-Marc PASTOR
Source : https://www.dalloz-actualite.fr/flash/l-office-du-juge-en-matiere-de-permis-valant-autorisant-commerciale#.XQOFQIgzaUk
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